En 1842, les îles Marquises furent annexées par le contre-amiral Abel Dupetit-Thouars, au nom de sa majesté Louis Philippe! Le 1er mai, dans la baie de Vaitahu (Tahuata) pour le groupe Sud, puis le 31 mai dans la baie de Taiohae (Nuku Hiva), pour le groupe Nord. L’archipel devient alors la première colonie de la France dans le Pacifique (quelques mois avant Tahiti, le 6 novembre 1944).
Suite à cette colonisation, les populations survivantes ont dû abandonner les anciens centres communautaires des vallées pour se déplacer sur le littoral, autour des établissements missionnaires et coloniaux. Malgré une présence française très limitée, la résistance à la colonisation et à la christianisation s’est organisée, notamment par la construction de forts, mais en vain. L’effondrement de la société s’est alors accentué entre 1860 et 1890, lié aux épidémies, à la dépopulation, aux violences entre tribus ou contre le pouvoir colonial ou encore suite aux terribles périodes de sécheresse entraînant des famines meurtrières. L’évangélisation s’est intensifiée dans les années 1880-1890 alors qu’il ne restait que quelques survivants sur les îles. La société ‘enata entre alors dans le XXe siècle affaiblie, ayant perdu l’immense majorité de sa population ainsi que les structures ancestrales de son monde, détruites et remplacées par de nouvelles.
C’est avec le développement de Tahiti, et notamment de son port comme point d’escale pour les navires commerciaux que l’archipel des Marquises fut peu à peu délaissé et tomba dans l’anarchie. Aux yeux des Occidentaux, les Marquises entraient alors dans un oubli d’où elles ne furent tirées que par les œuvres de Paul Gauguin au début du XXe siècle. Quelques récits de voyageurs fortunés ou de missionnaires et de rares fonctionnaires levaient alors le voile sur une culture bouleversée par tous ces contacts, comme le récit de Robert Louis Stevenson, “Dans les mers du Sud”. L'étude approfondie de la culture marquisienne ne commence véritablement qu’avec Karl von den Steinen, en 1896-1897, médecin, ethnologue allemand, avec son ouvrage “Die Marquesaner und ihre Kunst” (publié en 1928) et avec les travaux de la Bayard Dominick Expedition du Bishop Museum de Hawaii.
Les Îles Marquises ont connu, comme d’autres îles océaniennes, un important effondrement de leur population dès les premiers contacts avec les Européens. Avec près de 96% de la population marquisienne qui aurait péri, c’est le choc démographique le plus important de tout le Pacifique. Cette chute s’est poursuivie jusqu'au milieu des années 1920 où l'on enregistrait à peine 2000 individus !
Cette dépopulation violente des Marquises est la conséquence de plusieurs facteurs, à la fois externes et internes:
-L’introduction de maladies nouvelles par les Européens (telles que la variole, la tuberculose, la dysenterie, la grippe, la rougeole, les oreillons, etc.) a déclenché des épidémies foudroyantes sur une population non immunisée.
-La propagation de maladies vénériennes a engendré de son côté une baisse massive de la fécondité, près de la moitié des femmes ne pouvant pas avoir d’enfants.
-Ces épidémies, associées à la consommation d’alcool et aux conflits intertribaux, ont alors entraîné la désorganisation complète de la société.
-Parallèlement, l’environnement particulier et les conditions climatiques des Marquises favorables aux sécheresses régulières, ont semble t-il accentué au début du XIXe siècle cette déperdition.
Engagés dès 1940 dans la France-Libre, les Marquisiens deviendront officiellement citoyens français en 1945, mais sans grands changements car le développement des archipels était considéré comme secondaire.