Architecture monumentale

Malgré les contraintes topographiques, les Ènata se sont révélés de véritables bâtisseurs qui ont appris à maîtriser la construction sur les terrains en pente des vallées pour enraciner leur habitat. Ils ont construit des plateformes surélevées typiques d

Une architecture monumentale…

Ces plateformes, appelées paepae, généralement carrées ou rectangulaires formées de pierres de grande taille en maçonnerie sèche, pouvaient atteindre 6m de hauteur. Elles formaient l’unité de base de l’architecture monumentale marquisienne et servaient de soubassement aux maisons en bois. Elles avaient la particularité d’être à deux niveaux avec une terrasse basse extérieure et un niveau plus élevé couvert, réservé à l’intimité et au sommeil. Les dalles de tuf (ke’etu) placées sur champs, sculptées ou pas, servaient à délimiter les deux niveaux. La nature de la roche utilisée et la présence de motifs sculptés permettent de distinguer encore aujourd’hui les demeures d’une personne de haut rang de celles des communs. La construction de ces plateformes marquait non seulement la volonté de se dégager du sol et de l’écoulement des pluies torrentielles, mais était aussi le moyen de rattraper la déclivité des pentes des vallées sur lesquelles était édifié l’habitat.

… et peu hiérarchisée

Aux Marquises, ces plateformes monumentales d’habitation n’étaient pas seulement réservées aux personnes de haut rang. L’Homme du commun tout autant que le prêtre (tau’a) ou le chef (haka’iki), chaque individu, quelque que soit son statut social, habitait dans une maison en bois au toit de feuilles tressées (fa’e ou ha’e) édifiée sur un soubassement en pierre (paepae). L’habitat marquisien apparaît ainsi monumental et peu hiérarchisé, à la différence du reste du Pacifique. C’est à partir de ce module de base que se déclinaient les complexes architecturaux cérémoniels.

Le tohua, complexe cérémoniel, était au centre de la vie de la communauté. Il matérialisait le prestige d’un chef, le haka’iki, et la cohésion du groupe social réuni sous son autorité. Place publique, lieu de rassemblement, il se présentait habituellement sous la forme d’un grand espace de danse rectangulaire – qui pouvait dépasser 150m de longueur - entouré de différents bâtiments (paepae) aux fonctions spécifiques : habitation du chef, des guerriers, des tau’a (prêtre), les sites dédiés au rituel et au funéraire, les gradins et les habitations des invités et des membres de la chefferie. Ce complexe accueillait les nombreuses cérémonies et rituels, festins communautaires (koika) auxquels étaient conviées les chefferies alliées afin de démontrer la prospérité de la communauté et la puissance du mana du chef qui avait su s’allier aux divinités pour assurer la fertilité de ses terres et l’abondance de ses ressources. En effet, la vie du groupe et le prestige de son chef étaient intimement liés à la capacité du groupe à construire ces grands complexes cérémoniels et donc liés à la nécessité de fédérer et organiser une main d’œuvre nombreuse en faveur d’un projet monumental.

Les me’ae, complexes religieux composés de plusieurs paepae et pavages associés ensemble. Contrairement aux tohua, ils ne suivent pas un plan ou un modèle spécifique et présentent une grande variété de formes. Les me’ae étaient différenciés par des attributs qui ont aujourd’hui disparus tels que la forme des maisons en bois édifiées sur ces plateformes, les ornements sculptés et tressés, les marques de tapa blanc, symbole de sacralité, et la présence de dalles de ke’etu. Seuls demeurent aujourd’hui les tiki et les dalles de tuf sculptées. Ils sont parfois isolés, parfois situés à proximité d’un tohua et donc proches du centre communautaire.

Taputapuātea
Te Henua Ènata - les îles marquises
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